CASS. COM., 6 juin 2001

La notion d’immeuble inachevé, au sens de l’article 691 ancien du Code général des impôts, désormais codifié sous l’article 1594-OG du même code, qui les assimile à des terrains à bâtir, implique une construction ou une reconstruction interrompue.

Note de M. Jean-Pierre MAUBLANC :

Confirmant l’interprétation novatrice dégagée par le tribunal de grande instance de Paris, le présent arrêt de la Cour de cassation définit prétoriennement la notion d’immeuble inachevé, assimilée à celle de terrain à bâtir, dont l’acquisition entre dans le champ de la taxe sur la TVA immobilière en application des articles 691 ancien du Code général des impôts (devenu l’article 1594-OG), et 257-7° du même code.

En effet, on ne trouve pratiquement pas de décision de jurisprudence sur la définition de l’immeuble inachevé, au sens de l’article 691 ancien du Code général des impôts. Au cas particulier, la société requérante revendiquait l’application du régime de la TVA immobilière pour l’acquisition d’un immeuble qu’un procès-verbal de constat d’huissier décrivait comme étant « en totale réhabilitation, dans tous les locaux, dépourvu de sanitaire, les cloisonnements ayant été abattus, les paliers et la cage d’escalier n’ayant pas encore été rénovés ». Au soutien de son argumentation visant à faire juger qu’elle avait acquis un immeuble inachevé, la société requérante invoquait la définition de l’achèvement tiré des dispositions de l’article 258 de l’annexe II au Code général des impôts. Il résulte, en effet, de cette définition que pour l’application de l’article 257-7° du même code visant le champ d’application de la TVA immobilière, l’immeuble ou une fraction d’immeuble est considéré comme achevé lorsque les conditions d’habitabilité ou d’utilisation sont réunies ou en cas d’occupation, même partielle des locaux. Pour l’application de la condition d’habitabilité ou d’utilisation visée par ledit article, une jurisprudence solidement établie considère que cette condition est remplie lorsque l’immeuble est raccordé aux réseaux.

Toutefois, ces arguments fondés sur la totale réhabilitation en cours de l’immeuble et sur la définition de l’achèvement n’ont pas conduit le juge de l’impôt à considérer que l’immeuble était inachevé à la date à laquelle il fut acquis par la société requérante. La Cour de cassation a repris littéralement la définition de l’immeuble inachevé et la motivation dégagées par le jugement du tribunal de grande instance de Paris frappé de pourvoi. Trois arguments fondent la solution retenue.

• En premier lieu, la définition des immeubles inachevés, assimilés à des terrains à bâtir par l’article 691-1 du Code général des impôts (désormais article 1594 OG du même code) est spécifique à l’application de ces dispositions, compte tenu de leur assimilation à des terrains à bâtir.

• En deuxième lieu, la définition de l’immeuble inachevé, assimilé à un terrain à bâtir, ne saurait résulter d’une interprétation a contrario de l’article 257-7° du Code général des impôts qui soumet à la TVA immobilière les cessions d’immeubles neufs effectuées dans les cinq ans suivant leur achèvement. En conséquence, la définition de l’achèvement de l’immeuble, dégagée par l’article 258 de l’annexe II, et résultant de la réunion des conditions d’habitabilité ou de l’occupation de l’immeuble neuf, est inapplicable lorsqu’il s’agit de définir l’immeuble inachevé assimilable à un terrain à bâtir.

• Il en résulte, en troisième lieu, une définition positive de l’immeuble inachevé. La Cour de cassation reprend à son compte l’élégante définition dégagée par les juges du fond selon laquelle l’immeuble inachevé est celui dont la construction ou la reconstruction a été interrompue. Cette définition suggère que l’immeuble inachevé n’est pas seulement celui qui, au moment de l’acquisition, a fait l’objet de travaux, même très importants, laissés en cours de réalisation. C’est l’immeuble qui a fait l’objet, avant son acquisition, d’une restructuration dont l’ampleur aurait permis de l’assimiler à une construction neuve.

Source : AJDI 2002 n° 2 page 147