La suppression d’une servitude conventionnelle par le propriétaire du fonds servant, sans l’accord préalable du propriétaire du fonds dominant, justifie son rétablissement malgré l’offre de son déplacement.
Des parcelles bénéficient de servitudes conventionnelles de passage qui s’exercent sur deux parcelles contiguës appartenant à une commune et à une société.
Mais, suite à la création d’un lac artificiel, celles-ci ont supprimé les servitudes et ont proposé un autre tracé.
Elles sont alors assignées en rétablissement des servitudes par le couple propriétaire du fonds dominant.
Les juges d’appel déboutent le couple de sa demande de rétablissement au motif que la suppression de la servitude constitue une violation de l’engagement contractuel mais ne justifie pas le rétablissement, les conditions pour un déplacement d’assiette étant réunies.
La Cour de cassation censure la motivation des juges d’appel au visa de l’article 701 du Code civil : elle leur reproche de n’avoir pas tiré les conséquences légales de leurs propres constatations, alors qu’ils avaient « constaté que la double servitude avait été supprimée sans l’accord préalable des époux« .
Note de Mme Cécile LE GALLOU :
L’article 701 du Code civil interdit au propriétaire du fonds servant de diminuer ou de rendre incommode l’usage de la servitude.
Toutefois, l’alinéa 3 de ce même texte lui permet, lorsque l’assiette est devenue excessive, d’offrir au propriétaire du fonds dominant une autre assiette présentant la même commodité.
Dans ce cas, la modification s’imposera au propriétaire du fonds dominant, sans qu’il soit nécessaire d’obtenir son accord (art. 701, al. 3, in fine ; Cass. 3e civ., 18 mars 1987).
En revanche, le propriétaire du fonds servant peut solliciter la suppression pure et simple de la servitude, mais cette suppression suppose l’accord du propriétaire du fonds dominant.
En somme, il ne peut arguer du caractère devenu excessif de la servitude pour la supprimer.
La proposition d’une nouvelle assiette n’y change alors rien