Servitude par destination du père de famille : charge de la preuve.
Note de M. Grégoire FOREST :
Deux maisons contiguës présentaient la particularité d’être reliées par un escalier, l’une desservant l’autre par une entrée unique.
Un conflit de voisinage en naquit, et les propriétaires de la première maison assignèrent ceux de la seconde en interdiction d’utiliser l’escalier et l’entrée de leur immeuble.
En défense, ces derniers invoquèrent l’existence d’une servitude de passage constituée par destination du père de famille.
La particularité de l’espèce tenait au fait que l’auteur commun duquel était censé avoir émané la division, ainsi que l’époque de celle-ci, étaient inconnus.
Pour se déterminer, les magistrats ne disposaient que d’un rapport d’expertise selon lequel les deux maisons appartenaient « vraisemblablement » à l’origine au même propriétaire, cette appartenance commune constituant la seule explication plausible de l’existence de l’escalier litigieux.
Il s’en déduisait, selon l’expert, que l’auteur commun des parties au litige avait entendu desservir les appartements de la seconde maison par l’escalier situé dans celle qu’il avait construite la première.
Se basant sur ces conclusions, les juges du fond retinrent l’existence d’une servitude par destination du père de famille, relevant qu’aucune disposition contraire d’un acte de division n’était invoquée pour écarter la servitude en cause.
Leur décision est censurée au visa des articles 694 et 1315 du Code civil, au motif que c’est à celui qui invoque l’existence d’une servitude discontinue constituée par destination du père de famille de produire l’acte par lequel s’est opérée la séparation des deux héritages et d’établir qu’il ne contient aucune disposition contraire à l’existence de cette servitude.