CASS. CIV. 3è, 2 juin 1999

En présence du droit de préemption qui appartenait à la commune, le propriétaire d’un terrain se soumet à la procédure classique ; il notifie son intention d’aliéner et le prix demandé (2.500.000 F) ; la commune propose un prix inférieur (2.300.000 F) en précisant qu’elle ne pose aucune condition ; cette offre est acceptée par le vendeur mais la commune se dérobe et fait savoir qu’elle n’a plus l’intention d’acquérir. Assignée en exécution forcée, elle soutient que sa proposition a été faite non dans le cadre du droit commun de la vente mais dans celui du droit de préemption ; elle veut en déduire que par application de l’article L. 213-14 du Code de l’Urbanisme, lorsque le prix n’est pas payé dans les six mois – ce qui était le cas -, l’ancien propriétaire ne peut réclamer que la rétrocession du terrain pour pouvoir l’aliéner à nouveau. La Cour d’appel a cru pouvoir retenir ce moyen ; son arrêt est cassé d’un mot : « qu’en statuant ainsi alors qu’elle avait constaté un accord sur la chose et sur le prix, la Cour d’Appel a violé le texte susvisé » (art. 1583 c. Civ.).

Note :

Il faut approuver cette censure ; certes le droit de préemption conféré aux communes est inspiré par des considérations d’intérêt général ; certes il est de ce fait réglementé de façon spécifique ; mais il serait excessif d’admettre que cette réglementation soit autonome et exclusive des règles du droit commun ; ce serait permettre aux communes une désinvolture inadmissible dont l’espèce fournit du reste un exemple ; une commune exercerait son droit de préemption puis, pour se dérober, omettrait de payer le prix et opposerait au vendeur qu’au bout de six mois il aura le droit de demander la rétrocession… Observons du reste que l’article L.213.14 du Code de l’Urbanisme qui prévoit cette solution parle bien de rétrocession – ce qui implique que la cession a eu lieu – précisément par la rencontre des volontés, conformément au droit commun.

Source : (RDI 99 n° 3 page 421