C.E. 29 juin 2001

Les dispositions de l’article L.315-8 du Code de l’Urbanisme, qui garantissent au détenteur d’une autorisation de lotir la stabilité des règles d’urbanisme pendant cinq ans après la fin des travaux, font obstacle à ce qu’il puisse prétendre à une indemnité en raison du classement des terrains en zone inconstructible durant cette période.

Note de M. DEREPAS :

La SA Blanc a obtenu en 1990 une autorisation de lotir un terrain situé dans la commune de Domène.

Le préfet décida ultérieurement de mettre en œuvre un projet d’intérêt général de protection contre les risques d’inondation, qui se traduisit en 1992 par le classement du terrain en cause en zone inconstructible. La SA Blanc demanda à être indemnisée du préjudice résultant de ce classement.

L’article L.160-5 du Code de l’Urbanisme exclut que les servitudes instituées en application de ce code puissent donner lieu à indemnisation, sauf lorsque leur instauration porte atteinte à des droits acquis ou modifie l’état des lieux dans une mesure créant un préjudice direct, matériel et certain.

Sur la base de ces seules dispositions, il eût été concevable que la SA Blanc, qui avait obtenu une autorisation de lotir et dont les terrains étaient désormais inconstructibles, obtienne une indemnisation.

Les dispositions de l’article L.160-5 devaient toutefois, au cas d’espèce, être combinées avec celles de l’article L.315-8 du code relatives aux autorisations de lotir. Selon ces dispositions, dans les cinq ans qui suivent l’achèvement d’un lotissement , les permis de construire ne peuvent être refusés sur le fondement de dispositions d’urbanisme intervenues postérieurement à l’autorisation.

Il en résultait que le classement des terrains en zone inconstructible n’était pas opposable à la SA Blanc, qui bénéficiait pour la durée prévue à l’article L.315-8 d’une garantie de stabilité des règles d’urbanisme en vigueur à la date de l’autorisation. Les terrains restaient donc constructibles et le classement ne pouvait être regardé comme portant atteinte à ses droits acquis. Le Conseil d’Etat a donc validé le raisonnement de la CAA de LYON, qui avait jugé que la SA Blanc ne pouvait se prévaloir des dispositions de l’article L.160-5 à l’appui de sa demande indemnitaire.

Certes, pourra-t-on objecter, il était désormais très difficile en pratique pour la SA Blanc de construire et de commercialiser des habitations dans une zone déclarée inconstructible en raison de son caractère inondable. Mais le préjudice résultant de la difficulté de commercialisation provient dans ce cas du caractère inondable de la zone, non du classement, qui n’a fait que l’officialiser et en tirer les conséquences.

Source : RDI 2001 n° 5 page 537