C.E. 23 mai 2001

Il résulte des articles R.315-30, R.315-32 et R.315-36 du Code de l’urbanisme qu’en cas de délivrance d’une autorisation de lotir « par tranches », le défaut d’exécution des travaux de l’une des tranches dans le délai prévu a pour effet de rendre caduque l’autorisation de lotissement ; il en résulte, conformément à l’article R.315-30 du Code de l’urbanisme, que l’opération ne peut se poursuivre que pour les tranches dont les travaux ont été menés à leur terme. Il en résulte aussi nécessairement que les documents du lotissement, et notamment le cahier des charges approuvé, s’ils sont frappés de caducité, faute d’objet, pour les tranches du lotissement dont l’aménagement n’a pas été mené à terme, continuent à régir celles dont l’aménagement a été achevé.

Note de M. Patrice CORNILLE :

C’est la première fois que le CE se prononce, à notre connaissance, sur les conséquences de la caducité d’un arrêté de lotir « par tranches » sur l’applicabilité du cahier des charges approuvé régissant le lotissement considéré.

Il faut avant tout rappeler les dispositions de l’article R.315-30 du Code de l’Urbanisme, qui sont à la fois la source et la solution de la difficulté :

« L’arrêté d’autorisation du lotissement devient caduc si les travaux d’aménagement ne sont pas commencés dans un délai de six huit mois à compter de la notification au lotisseur de l’arrêté d’autorisation de la date à laquelle l’autorisation est réputée accordée en application de l’article R.315-21.
Il en est de même si lesdits travaux ne sont pas achevés dans le délai fixé par l’arrêté et qui ne peut être supérieur à une durée de trois ans décomptée comme il est dit à l’alinéa précédent.
Toutefois, dans le cas où la réalisation de travaux par tranches a été autorisée, les délais impartis aux lotisseurs en application des alinéas ci-dessus s’appliquent aux travaux de la première tranche. Les délais impartis pour réaliser les travaux des autres tranches sont fixés par l’arrêté d’autorisation sans qu’ils puissent excéder une durée de six ans décomptée comme il est dit à l’alinéa 1er du présent article.
Lorsque l’autorisation est devenue caduque, l’opération ne peut être poursuivie qu’en ce qui concerne les tranches dont les travaux d’aménagement ont été menés à terme. »

On remarquera que ce texte réglemente les conditions de la poursuite de la commercialisation des lots dans un lotissement inachevé, mais ne traite absolument pas des conséquences de cet inachèvement sur l’applicabilité des documents (règlement ou cahier des charges) régissant le lotissement considéré.

En ce qui concerne les effets de la caducité de l’autorisation de lotir, l’article R.315-30 du Code de l’urbanisme prévoit exclusivement que :

« lorsque l’autorisation est devenue caduque, l’opération ne peut être poursuivie qu’en ce qui concerne les tranches dont les travaux d’aménagement ont été menés à terme. »
…/…

Ce texte ne fournit donc aucune directive au sujet du maintien ou au contraire de la disparition des règles d’urbanisme régissant le lotissement dont l’autorisation est caduque. Dans l’arrêt, la Haute Juridiction nous fournit la solution manquante en jugeant, au visa du texte ci-dessus que :

« (puisque) l’opération ne peut se poursuivre que pour les tranches dont les travaux d’aménagement ont été menés à leur terme (…) il en résulte aussi nécessairement que les documents du lotissement, et notamment le cahier des charges approuvé, s’ils sont frappés de caducité, faute d’objet pour les tranches du lotissement dont l’aménagement n’a pas été mené à terme, continuent à régir celles dont l’aménagement a été achevé. »

C’est manifestement consacrer la divisibilité par « tranches » de la caducité de l’autorisation de lotir pour inachèvement des travaux prescrits par l’arrêté d’autorisation.

Pour la ou les tranches dont les travaux de viabilisation ont été menés à leur terme : l’autorisation est caduque, mais le règlement et le cahier des charges du lotissement continuent de s’appliquer et régissent la délivrance des permis de construire sur les lots compris dans la tranche considérée.

Pour les tranches dont l’aménagement n’a pas été mené à son terme, l’autorisation de lotir est également caduque mais, le règlement et le cahier des charges n’ayant plus vocation à s’appliquer, les règles d’urbanisme régissant les tranches considérées sont celles du POS (PLU) ou du RNU. Cela signifie, par conséquent, que pour le solde du lotissement considéré, le lotisseur doit obtenir une nouvelle autorisation de lotir s’il désire détacher plus de deux terrains à bâtir compris dans la ou les « tranches » inachevées.

Source : CONSTRUCTION-URBANISME, septembre 2001 page 20