C.E., 15 février 2001

Le requérant qui invoque un préjudice commercial découlant de l’ouverture imminente d’une surface de vente postérieurement à la délivrance par la CDEC d’une autorisation de transfert de l’activité de l’entreprise et d’augmentation de la surface de vente, ne remplit pas la condition d’urgence de l’article L.521-1 du Code de Justice administrative dès lors qu’il ne démontre pas que l’ouverture au public pourrait intervenir sans la construction préalable, ou la transformation (le cas échéant après demande et obtention d’un permis de construire) du ou des bâtiments appelés à abriter les installations correspondantes.

Le juge des référés est donc bien fondé en application de l’article R.522-1 du même code, à rejeter la demande par ordonnance motivée sans ouvrir les débats contradictoires.

La présente décision ne fait pas obstacle à ce que, si l’ouverture au public devenait ultérieurement imminente, une nouvelle requête soit présentée au juge des référés dans l’attente d’une décision définitive sur le fond.

Note de M. Patrice CORNILLE :

La loi du 30 juin 2000 relative aux référés devant les juridictions administratives entrée en vigueur le 1er janvier 2001 a créé dans l’ordre administratif un véritable juge des référés.

Ces dispositions sont codifiées au livre V du titre II du Code de justice administrative. En particulier l’article L.52-1 crée une procédure de référé-suspension qui remplace en grande partie l’ancien sursis à exécution. L’espoir qui découle de ces nouvelles dispositions est de voir étendre le champ d’application des procédures d’urgence en matière administrative notamment dans le domaine de la construction et de l’urbanisme qui en étaient exclues de fait.

En effet, le sursis à exécution ne pouvait être prononcé qu’à la double condition d’un moyen sérieux d’annulation et surtout, que l’exécution de la décision risque d’entraîner des conséquences difficilement réparables. Grâce à cette évolution législative, il y a désormais tout lieu de penser que le référé-suspension deviendra une procédure classique des praticiens du contentieux dans tout le domaine de l’immobilier. Les premières décisions ont été rendues publiques très rapidement. Le CE désire en effet fixer le plus rapidement possible des lignes jurisprudentielles afin de cadrer les décisions des juges de première instance. C’est dans ce contexte qu’a été rendue la décision ci-dessus rapportée, dont le principal mérite est d’intéresser directement l’urbanisme commercial. 

En l’occurrence, la condition d’urgence n’est pas considérée comme remplie car les requérants ne justifient pas de l’imminence du préjudice commercial qu’ils invoquent, pouvant résulter de l’ouverture au public du nouvel établissement.

La requête aurait dû préciser que la nouvelle surface commerciale est susceptible d’être ouverte dans un bref délai au public.

En l’espèce, un doute demeurait dans l’esprit du juge estimant à juste titre qu’un tel transfert d’activité doublé d’une augmentation de la surface de vente, devait très certainement s’accompagner de travaux de construction ou de transformation du local recevant la nouvelle exploitation et donc, nécessiter l’obtention d’une autorisation d’urbanisme telle que la délivrance d’un permis de construire.

C’est pourquoi le juge considère qu’au jour où il statut, l’imminence du préjudice n’est pas établie puisque les requérants ne justifient pas que l’ouverture au public pouvait intervenir sans construction préalable.

Source : Construction-Urbanisme, août 2001 page 24