C.A. PARIS, 17 mars 1998 CASS. CIV. 1er., 30 mai 2000

S’agissant d’un contrat d’assurance complémentaire dont l’original a été égaré par l’assureur, c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’appréciation de la valeur et de la portée de la photocopie qui lui était soumise, que la cour d’appel a jugé que la photocopie, qui ne révélait aucune trace de falsification par un montage de plusieurs documents et permettait de constater que les caractéristiques d’ordre général de l’écriture du bulletin complémentaire de 1992 présentaient de grandes similitudes avec celles du bulletin d’adhésion de 1990, constituait une copie sincère et fidèle du document original, au sens de l’article 1348, alinéa 2, du Code civil.

Note de M. Frédéric NIZARD :

Quelle est la force probante d’une photocopie ? La question est simple, la réponse l’est beaucoup moins. Prima facie, il règne en effet une impression de flottement jurisprudentiel quant à la qualification donnée aux photocopies. Certains arrêts les qualifient de commencement de preuve par écrit, d’autres de copie fidèle et durable. L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 17 mars 1998 et l’arrêt de la Première chambre civile de la Cour de cassation du 30 mai 2000, rendus dans la même affaire, permettent de mieux comprendre la force probante que la jurisprudence confère aux photocopies en matière civile.

Qualifier une photocopie de copie fidèle et durable au sens de l’article 1348, alinéa 2, du Code civil peut sembler hétérodoxe.

Certes, la photocopie est bien une copie durable au sens de l’article 1348 du Code civil : le procédé électrostatique utilisé correspond en effet à ce que la loi qualifie de manière sibylline de « reproduction indélébile de l’original qui entraîne une modification irréversible du support » (art. 1348, al. 2 in fine).

On peut en revanche s’interroger sur le caractère fidèle de la photocopie. La doctrine majoritaire, s’inspirant des travaux de Mme Françoise Chamoux, estime que seuls les « microfilms de sécurité », c’est-à-dire les microfilms réalisés à la suite d’une double prise de vue en lumière blanche et en lumière ultra-violette, sont des copies fidèles et durables. Les autres micro-films et les photocopies n’offriraient pas, quant à eux, de garantie de fidélité à l’original.

Et il est notoire qu’il est possible de falsifier un document par un montage dont les traces disparaîtront grâce à une photocopieuse.

Pourtant, aujourd’hui, la Cour de cassation semble considérer que les photocopies sont des copies fidèles et durables à la condition que l’original ait disparu et que l’intégrité de l’imputabilité du contenu de la copie à l’auteur désigné n’aient pas été contestées ou qu’elles aient été vérifiées.

Source : JCP N, 2002 n° 12 page 475