C.A. PARIS, 12 février 2002 C.A. AIX, 8 juin 2000

Un emplacement de garage ne correspondant pas aux caractéristiques convenues, l’acquéreur est bien fondé à demander la résolution de la vente (1ère espèce).

L’action résolutoire est soumise à la prescription trentenaire (2ème espèce).

Note de M. Daniel SIZAIRE :

I – Dans l’espèce ayant donné lieu à l’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 12 février 2002 (1ère espèce), le plan annexé à l’acte de vente en l’état futur d’achèvement (secteur protégé) d’un emplacement de garage en sous-sol figurait par un trait fin les limites séparatives des emplacements et, entre celui vendu et celui contigu, était mentionné par un trait gras un mur de soutien non coté débordant légèrement des emplacements de parkings eux-mêmes ayant comme longueur à l’intérieur de l’emplacement environ 1/5ème de sa longueur totale.

A la livraison, l’acquéreur s’aperçoit que ce mur de soutien a été remplacé par une paroi pleine tout au long de la limite séparative entre les lots. L’acquéreur demande une mise en conformité, impossible, le mur litigieux constituant un élément porteur, puis la résolution de la vente. Il obtient satisfaction par un jugement confirmé par la Cour d’appel qui souligne que la localisation d’un emplacement de parking dans un sous-sol et sa configuration constituent un des éléments substantiels dans le choix opéré par l’acquéreur, que si la surface de l’emplacement n’est pas en cause la tolérance de 5 % n’étant en effet pas dépassée, que se garer sur cet emplacement n’est en effet pas impossible mais que la présence du mur plein d’un côté rend la manœuvre plus délicate et ne permet qu’une ouverture beaucoup plus limitée des portières, monter et descendre de voiture devenant plus difficile.

Le vendeur doit en effet livrer une chose conforme à la chose vendue, à défaut de quoi il ne satisfait pas à ses obligations contractuelles. L’acquéreur n’a pas à démontrer une faute du vendeur ou un préjudice, mais seulement à montrer qu’il y a non-conformité.

Dans ce cas, l’acquéreur a le choix entre demander la résolution du contrat ou la mise en conformité de la chose vendue ou un équivalent sous forme d’indemnisation. Les juges du fond disposent d’un pouvoir souverain d’appréciation pour fixer les modalités de réparation du préjudice provenant d’un défaut de conformité entre la chose contractuellement promise et la chose livrée (Cass. 3è civ., 8 mars 2000).

Les incidences du défaut de conformité peuvent être lourdes. Par exemple l’acquéreur peut éventuellement faire valoir que l’emplacement de garage tel que prévu a été une condition déterminante de l’acquisition de l’appartement au service duquel il devait être affecté.

II – L’arrêt de la Cour d’appel d’Aix-en-Provence (2ème espèce) est donné ici à titre d’illustration.

En l’occurrence, les acquéreurs en l’état futur d’achèvement d’une villa constatent des non-conformités et des défauts d’achèvement – ce qui est la même chose – par rapport aux stipulations du contrat de vente. A leur demande, la résolution de la vente est prononcée aux torts exclusifs du vendeur.

En appel, le vendeur faisait valoir l’irrecevabilité de l’action des acquéreurs pour non-respect des dispositions de l’article 1642-1 du Code Civil aux termes duquel « le vendeur d’un immeuble à construire ne peut être déchargé, ni avant la réception des travaux, ni avant l’expiration d’un délai d’un mois après la prise de possession par l’acquéreur, des vices de construction alors apparents et plus spécialement de l’article 1648, alinéa 2, du même code aux termes duquel dans le cas prévu à l’article 1642-1, l’action doit être introduite, à peine de forclusion, dans l’année qui suit la date à laquelle le vendeur peut être déchargé des vices apparents. »

Le jugement est confirmé au motif que les acquéreurs ont entendu agir sur le fondement des dispositions de l’article 1184 du Code Civil – qui impliquent une livraison conforme aux prévisions de l’acte de vente – et non sur le fondement juridique des vices cachés et :

« Attendu que l’action résolutoire fondée sur les dispositions de l’article 1184 du Code Civil est soumise à la prescription trentenaire. »

Il est exact que les dispositions de l’article 1642-1 du Code Civil s’appliquent aux désordres de construction – et par voie de conséquence l’article 1648, alinéa 2, pris pour son application – et non aux défauts de conformité par rapport aux stipulations de l’acte de vente. Il s’agit là de deux choses différentes de sorte qu’il ne peut être fait application à des non-conformités du délai d’action limité à 12 mois de l’article 1648, alinéa 2 du Code Civil (Cass. 3è civ., 8 avril 1998).

S’agissant des défauts de conformité par rapport au contrat, il n’est pas prévu de délai particulier, ce qui permet à la Cour d’appel de retenir, dans l’arrêt rapporté, la prescription trentenaire de droit commun.

Pour éviter un tel délai irréaliste, il est généralement stipulé dans les actes de vente un délai conventionnel pour dénoncer les non-conformités apparentes, une pratique qui est reconnue valable malgré, peut-être, une certaine réticence dans son application (Cass. 3è civ., 8 avril 1998, préc.). En revanche, aucune stipulation ne permet, semble-t-il, d’échapper à la prescription trentenaire s’agissant de non-conformités cachées.

Source : CONSTRUCTION-URBANISME, juillet 2002 page 8