ETUDE de Mme Laurence ORY

Aides des collectivités locales à l’investissement immobilier des entreprises : quels changements après le décret du 27 mai 2005 ?

Après la publication de la loi relative aux libertés et responsabilités locales du 13 août 2004, dont l’article 1er a opéré une refonte du régime des aides des collectivités locales au développement économique, le décret qui précise les conditions d’octroi des aides à l’investissement immobilier des entreprises est paru le 27 mai 2005.

Ce texte réorganise la section 2 du chapitre unique du titre 1er (livre cinquième) du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) qui comporte désormais les articles R. 1511-4 à R. 1511-23, intégralement consacrés aux aides à l’investissement immobilier et à la location d’immeubles accordées aux entreprises.

Les conditions nouvelles d’attribution des aides publiques locales à l’immobilier d’entreprise

Le principe est que la vente ou la location de terrains ou de bâtiments aux entreprises doit se faire « par référence aux conditions du marché », avec toutefois la possibilité pour les collectivités locales, pour les projets situés dans certaines zones, de consentir des rabais sur cette valeur de référence.

Les aides à la rénovation

Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent attribuer (seuls ou conjointement) des aides aux entreprises sous les formes et dans les conditions prévues à l’article L. 1511-3 nouveau du Code général des collectivités territoriales (c’est-à-dire sous forme de subventions ou de rabais sur le prix de vente ou de location-vente) pour favoriser la réutilisation après rénovation de bâtiments existants.

Le montant maximal de l’aide ne peut excéder la différence entre le prix de revient après rénovation et le prix correspondant aux conditions du marché. Le rabais consiste donc dans la prise en charge par la collectivité des frais de réhabilitation.

Les aides à l’investissement immobilier et à la location

Le décret du 27 mai 2005 subordonne le bénéfice des aides – qu’il s’agisse des aides à l’achat ou des aides à la location – à l’inclusion de l’entreprise en cause dans certaines zones géographiques et fixe, selon la zone considérée, les plafonds des aides possibles.

Ces aides sont allouées, dans les conditions prévues par l’article L. 1511-3 du Code général des collectivités territoriales, sous forme de subventions ou de rabais sur le prix de vente, de location ou de location-vente.

Les zones concernées

Il s’agit des zones éligibles à la Prime d’Aménagement du Territoire (PAT) au titre des annexes I (projets industriels) et II (projets tertiaires) du décret du 11 avril 2001 ainsi que des départements d’outre-mer.
Le montant des aides à l’achat

Il est exprimé en pourcentage par rapport à la « valeur de référence » (c’est-à-dire la valeur vénale du bien telle qu’elle résulte des conditions du marché).

Le décret du 27 mai 2005 réserve un sort différent aux entreprises situées dans les zones énumérées à l’annexe I du décret du 11 avril 2001 (et celles situées dans les départements d’outre-mer) ainsi qu’à celles situées dans les zones énumérées à l’annexe II du même texte.

Notification à la Commission européenne

La plupart des aides allouées dans le cadre du dispositif mis en place par ce décret – qu’il s’agisse d’aides allouées aux entreprises situées dans les zones éligibles à la PAT au titre de l’annexe I ou au titre de l’annexe II du décret du 11 avril 2001, et aux entreprises du secteur de l’agriculture – doivent, dès lors qu’elles ont pour effet de porter le montant total de l’aide publique allouée à un même projet au delà d’un certain seuil (seuil qui varie selon la zone d’implantation de l’entreprise bénéficiaire) doivent être notifiée à la Commission européenne (CGCT, art. R. 1511-10 et R. 1511-10-1 ; R. 1511-16 et R. 1511-20).

Cette obligation de notification incombe à l’Etat (CGCT, art. L. 1511-1-1 al. 1).

Les aides à la location

Ce sont celles qui portent sur des contrats de location simple, c’est-à-dire non assortie d’une option d’achat. Leur régime n’a pas été modifié dans le principe. Elles sont plafonnées pour les entreprises situées en zone PAT « industrie » et dans les départements d’outre-mer à 100 000 EUR par entreprise sur trois ans (CGCT, art. R. 1511-12) étant précisé que pour les entreprises situées en zone PAT « tertiaire » cette aide ne peut excéder 25 % de la valeur vénale locative (CGCT, art. R. 1511-15 al. 1er). Les entreprises du secteur du transport sont exclues de ce dispositif (CGCT, art. R. 1511-15 al. 2).

Les aides à l’investissement immobilier continuent à être attribuées de manière autonome par les collectivités locales (c’est-à-dire en dehors de toute convention avec la région), sous réserve toutefois de s’inscrire dans le « schéma régional de développement économique« .

Le décret comporte, enfin, quelques dispositions communes : ainsi, il précise que le crédit-bail immobilier et la location-vente sont considérés comme des aides à l’investissement immobilier, et entrent de ce fait dans le champ d’application du dispositif mis en œuvre (CGCT, art. R. 1511-22). Par ailleurs, il rappelle qu’il appartient à l’assemblée délibérante de la collectivité en cause de déterminer les conditions d’attribution, de liquidation, de versement, d’annulation et de reversement des aides, et que le bénéfice desdites aides est lié à la régularité de la situation de l’entreprise au regard de ses obligations fiscales et sociales (CGCT, art. R. 1511-23). Cette dernière exigence vise à réserver le bénéfice des aides à l’immobilier aux entreprises dont la situation financière est saine.

Pour conclure, on attirera l’attention sur le problème du cumul des aides publiques. En effet, les collectivités locales peuvent elles-mêmes bénéficier pour la mise en œuvre des opérations immobilières de subventions accordées par d’autres collectivités publiques (Etat, autres collectivités territoriales, Communauté européenne) notamment sur les crédits de la dotation de développement rural ou sur les fonds structurels européens.

Elles ne peuvent évidemment pas se servir de ces aides qui sont également des aides publiques pour augmenter le taux des rabais autorisés par le nouveau dispositif. En effet, les plafonds prévus par ces dispositions réglementaires s’appliquent à toutes les aides publiques confondues quelque soit leur origine.

Source : JCP éd. Adm. et Coll. Territoriales, 4 Juillet 2005, 1259