Etude de MM. Philippe BOULISSET et Norbert BEAL

Les conditions dans lesquelles l’absence de réponse dans les délais à une demande d’autorisation d’urbanisme peut valoir permis tacite, sont modifiées depuis le décret du 7 janvier 2007.

Les nouveaux articles R. 423-17 à R. 423-74 du Code de l’urbanisme organisent les délais d’instruction des autorisations d’urbanisme qui ne peuvent être prolongés que dans des cas et selon des formes précises, faute de quoi le pétitionnaire est susceptible de se prévaloir d’un permis ou d’une décision de non opposition tacite.

Décompte du délai d’instruction

Le délai d’instruction court à compter de la réception en mairie d’un dossier complet et ce dossier est réputé complet si l’autorité compétente n’a pas, dans le délai d’un mois à compter de son dépôt en mairie, notifié au demandeur ou au déclarant la liste des pièces manquantes.

Lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées, l’autorité compétente, dans un délai d’un mois à compter de la réception ou du dépôt à la mairie, adresse au demandeur ou à l’auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou un courrier électronique (à condition que le demandeur ait accepté de recevoir à une adresse électronique les réponses de l’autorité compétents) indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes.

L’envoi doit préciser :

– que les pièces manquantes doivent être adressées à la mairie dans le délai de trois mois à compter de sa réception ;
– qu’à défaut de production de l’ensemble des pièces manquantes de ce délai, la demande fera l’objet d’une décision tacite de rejet en cas de demande de permis ou d’une décision tacite d’opposition en cas de déclaration ;
– que le délai d’instruction commencera à courir, à compter de la réception des pièces manquantes par la mairie.

Si dans le délai d’un mois, une nouvelle demande apparaît nécessaire, elle se substitue à la première et dresse de façon exhaustive la liste des pièces manquantes et fait courir le délai de trois mois.

En revanche, une demande de production de pièces manquantes notifiée après la fin du délai d’un mois n’a pas pour effet de modifier les délais d’instruction.
Les délais d’instruction sont en principe les suivants :

– un mois pour les déclarations préalables ;
– deux mois pour les demandes pour les demandes de permis de démolir et permis de construire portant sur une maison individuelle ;
– trois mois pour les autres demandes de permis de construire et pour les demandes de permis d’aménager.

Le délai applicable doit être notifié dans le récépissé de dépôt de la demande.

Ces délais sont susceptibles de diverses modifications et prolongations énumérées aux articles R. 423-24 à R. 423-33 du Code de l’urbanisme.

Acquisition de la décision tacite

L’article L. 424-2 énonce le principe que le permis est tacitement accordé si aucune décision n’est notifiée au demandeur à l’issue du délai d’instruction.

Corrélativement, l’article R 424-1 dispose qu’à défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction, le silence gardé par l’autorité compétente vaut les cas :

– décision de non opposition à la déclaration préalable ;
– permis de construire, permis d’aménager ou permis de démolir tacite.

Le silence gardé par l’administration vaut donc acceptation.

La différence, par rapport aux anciennes dispositions, porte sur l’absence de mise en demeure du demandeur ou déclarant envers l’administration.

Toutefois, l’article R 424-2 prévoit que le défaut de notification d’une décision expresse dans le délai d’instruction vaut décision implicite de rejet, lorsque le projet :

– est soumis à l’autorisation du Ministre de la Défense ou à une autorisation au titre des sites classés ou des réserves naturelles ;
– fait l’objet d’une évocation par un Ministre chargé des sites ou par le Ministre chargé des monuments historiques et des espaces protégés ;
– porte sur un immeuble inscrit ou un immeuble adossé à un immeuble classé au titre des monuments historiques ;
– est soumis à enquête publique ;
– entraîne la consultation de l’assemblée de Corse ;
– est situé dans un espace ayant vocation à être classé dans le cœur d’un futur parc national.

Retrait du permis tacite

La décision de non opposition tacite ne peut faire l’objet d’un retrait en vertu de l’article L 424-5.

Toutefois, le permis tacite peut faire l’objet d’un retrait se manifestant notamment par un arrêt de refus de permis ou d’opposition à travaux intervenant après la date de réalisation du permis tacite.

Ce refus s’analyse comme un retrait de l’autorisation tacite initiale.

Les règles de retrait d’une décision implicite sont gouvernées par l’article 23 de la loi du 12 avril 2000 qui dispose :

« Une décision implicite d’acceptation peut être retiré pour illégalité, par l’autorité administrative :

1° pendant le délai de recours contentieux, lorsque les mesures d’information des tiers ont été mises en œuvre ;
2° pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsque aucune mesure d’information des tiers n’a été mise en œuvre ;
3° pendant la durée de l’instance où un recours contentieux a été formé ».

S’ajoute à cela la nécessité du respect de la mise en œuvre d’une procédure contradictoire préalablement au retrait de l’acte, ainsi que l’exige l’article 24 de la loi du 12 avril 2000.

S’agissant des modalités, la loi prévoit que l’intéressé puisse demander à présenter des observations orales.

La mise en œuvre loyale et donc légale de cette procédure suppose qu’un délai suffisant soit donné à l’intéressé pour qu’il réagisse (environ 2 semaines).

Il s’agit d’une formalité substantielle (et donc impérative) qui doit être respectée sous peine de nullité de la décision de retrait (C.E. 29 novembre 2004).

Source : Etudes foncières, n°128, page 26