ETUDE de M. Stephan LE GOUEFF

L’arrêt « La Costa SARL »

La Cour administrative luxembourgeoise a jugé, dans l’arrêt « La Costa SARL » que les revenus de biens immobiliers situés en France revenant à une société de capitaux luxembourgeoise n’étaient pas imposables au Luxembourg.

De son côté, le Conseil d’Etat français considère que ces revenus ne sont pas imposables en France.

Cette divergence de jurisprudence aboutit à une double exonération et ouvre donc des perspectives intéressantes…

Le 23 avril 2002, la Cour administrative luxembourgeoise a rendu un arrêt, dans une affaire dite « La Costa SARL » qui ne manquera pas de retenir l’attention des particuliers ou professionnels qui détiennent des immeubles en France.

Dans cette affaire, en effet, la plus haute juridiction administrative luxembourgeoise a jugé, en substance, que les revenus de biens immobiliers situés en France revenant à une société de capitaux luxembourgeoise ne peuvent pas être imposés au Luxembourg.

Or, cette position des juges luxembourgeois est particulièrement remarquable en ce qu’elle prend l’exact contre-pied de la position arrêtée par les juridictions françaises qui, il y a déjà plusieurs années, avaient décidé que dans cette hypothèse particulière, seules les autorités fiscales luxembourgeoises étaient compétentes pour imposer les revenus immobiliers de la société luxembourgeoise.

Le résultat de cette divergence de jurisprudence est que les plus-values de cession et les revenus locatifs d’un immeuble situé en France et perçus par une société luxembourgeoise ne sont, pour le moment, imposables ni en France et ni au Grand-Duché de Luxembourg.

Au vu de ce qui précède, certains propriétaires pourraient donc être amenés à réfléchir à l’intérêt de créer une structure luxembourgeoise pour détenir de l’immobilier en France et ce, même s’il est probable, qu’à terme, le vide juridique qui existe aujourd’hui sera comblé.

Les propriétaires qui décideront de recourir à ce type de structure devront toutefois s’entourer d’un certain nombre de précautions.

De manière générale, deux précautions devront plus particulièrement être prises pour s’assurer de l’obtention de cette exonération.

Ainsi, la première précaution qui devra être prise a trait à ce que les praticiens désignent généralement sous le vocable de la « taxe de 3 % ».

Cette taxe, qui découle de l’article 990 du Code Général des Impôts français (CGI), vise, en effet, essentiellement à pénaliser, dans certains cas, les personnes qui sous le couvert d’une société étrangère, détiennent un immeuble en France.

En principe, cette taxe est due chaque année et est calculée sur la valeur vénale de l’immeuble.

Toutefois, il est possible d’échapper à cette taxe, moyennant le respect de certaines conditions.

Ainsi, la taxe n’est pas due, selon le Code Général des Impôts, si la personne morale détenant l’immeuble a son siège dans un Etat lié à la France par une convention fiscale visant notamment à lutter contre la fraude fiscale et qui comporte une clause d’échange de renseignements (ce qui est le cas dans la Convention).

Dans ce cas, le Code Général des Impôts prévoit que la société pourra être exonérée de cette taxe de 3 % sous la condition toutefois de déclarer chaque année, auprès des autorités fiscales françaises, l’identité de ses actionnaires et la consistance de son patrimoine.

Quant à la seconde précaution qui devra être prise afin de s’assurer de l’exonération, elle vise à éviter que la société ne puisse être considérée comme étant une société française ou comme ayant un établissement stable en France.

Ainsi, pour éviter d’être qualifiée de société française par le fisc français, la société devra avoir son siège effectif au Grand-Duché, ce qui implique notamment que les organes sociaux se réunissent de manière effective au Luxembourg.

De la même manière, la société devra s’assurer que l’immeuble ou les immeubles détenus ne puissent être qualifiés d’établissement stable.

Dans cette perspective, la société ne devra alors pas occuper l’immeuble pour ses besoins professionnels et devra sans doute se limiter à une location nue et non à une location meublée.

Source : Revue Fiche Notariale, 5 Sept. 2004, page 7